« Revivre », un parcours oecuménique pour encourager les séparés-divorcés.

« Encourager », tel est le mot clé de « Revivre », un parcours pour personnes séparées et divorcées. D’origine anglaise, il est proposé depuis quelques années en Suisse romande. Le 2 février dernier une journée de formation présentait ce cours oecuménique à une bonne cinquantaine de personnes.
Les responsables de « Revivre », de gauche à droite : Christine Koenig, Marco et Anne Mayoraz, Emanuel de Calonne, Jean-Denis Roquet. Duillier, 2 février 2013

L’orateur invité, Eric Castenskiold, responsable du « Recovery Course » en Angleterre partage son enthousiasme : « J’ai vu l’impact de ce cours sur les personnes : le passage du stress, de la souffrance à la paix et au sourire ». Lui-même y a participé après son divorce ; ce cours l’a aidé à reconstruire des relations. « Rétablir la vie et les relations, voici le but de Revivre. Et pour cela nous avons besoin d’être encouragés ».

L’orateur utilise une image suggestive pour décrire le but de ce parcours : « Dans une relation de mariage, le cheval et le cavalier ne font qu’un. Mais quand le cavalier tombe du cheval, il se blesse et ne veut pas remonter tout de suite. Il doit retrouver confiance et être soigné. C’est ce que propose ce cours ».

Le poids du divorce

Le divorce est un événement des plus stressants, qui diminue notre santé, notre bien-être et nos biens. Il concerne beaucoup de monde, car aujourd’hui la moitié des couples divorce, donc un enfant sur deux aura des parents divorcés. Le coût social est énorme : en Grande Bretagne, on l’estime à 60 milliards de francs !

« Dans un divorce, on ressent toute la gamme des émotions, mais peu d’aide est apportée. On commence à perdre ses amis, la vie sociale change. On se sent jugé par l’Eglise. C’est une expérience de désert et de nuit de l’âme ».

« Le divorce est un instant critique dans la vie, un carrefour, un temps de changements et de défis, où des choix sont à faire. A ce carrefour, nous savons que certaines choses n’iront pas bien, mais il y aussi la croix de Jésus et sa grâce. L’espérance et le rétablissement des relations sont le coeur du cours Revivre ».

  1. Castenskiold précise que ce cours ne donne pas de conseils, mais veut aider à trouver soi-même des réponses. Il offre un environnement sécurisant et non jugeant, où chacun peut partager son histoire. « Comprendre nos émotions, les communiquer, résoudre le conflit et pardonner sont les quatre étapes fondamentales dans nos relations. Quand une personne traverse ces étapes et en témoigne, c’est un encouragement pour tous ».

Ce cours a des bases chrétiennes, mais il n’est pas réservé qu’aux croyants. A chaque rencontre des non-croyants y participent. « Ce cours leur apporte aussi un soutien. Il leur parle de pardon, qui est au coeur d’un possible renouveau. Durant ce moment de crise, on commence à réfléchir sur les questions du sens de la vie et de la foi. Le cours peut servir de seuil : il ouvre une porte au Christ ».

Avancer plus rapidement avec ce cours 

« Le besoin est énorme, mais il y a peu d’ouvriers. Tant de personnes ont besoin d’accompagnement », conclut E. Kastenskiold. Dans un monde où on ne sait pas comment établir les relations, ce cours donne des outils et c’est un privilège d’aider dans ces moments critiques.

Cela peut durer plusieurs années, cependant ce cours améliore nos relations et permet d’avancer plus rapidement.

Au coeur de ce cours, il y a le passage de vendredi saint à Pâques. « Voir tant de vies restaurées, vivant ce passage est enthousiasmant. Ce n’est pas le cours, ni nous, qui aidons et restaurons les personnes, mais Dieu ».

Joies et défis du parcours

Ce parcours est organisé par un comité oecuménique. Après cette conférence, quelques responsables du cours ont participé à une table ronde. « Enfin nous avons une proposition pour accompagner les séparés et les divorcés. Dans l’Eglise catholique la souffrance est peut-être plus vive, mais maintenant on peut les rejoindre », dit Anne Mayoraz, responsable avec son mari Marco, de la Pastorale familiale du diocèse de Sion. Ce dernier constate : « Il y avait un manque. Ma joie est grande quand je vois le sourire des personnes qui ont parcouru un grand chemin. Une défi a été que, d’origine protestante, ce cours a été retravaillé afin de le rendre « catholico-compatible » ; ce fut un travail d’équipe passionnant ».

Emanuel de Calonne
, pasteur réformé à Bulle constate : « comme pasteur en milieu catholique, on me pose cette question : « je suis catholique, puis-je venir » ? – Je dois les rassurer sur le fait que le cours respecte toutes les Eglises ». Pour Jean-Denis Roquet, pasteur de l’Eglise réformée dans la région lausannoise, cette dimension oecuménique du cours est très dynamique : « dans chaque lieu, le défi est de constituer une équipe pour organiser ce cours, tant pour l’animation que pour l’infrastructure et les repas ».

Pour Sylviane Chollet, membre de l’Eglise évangélique de Gland, « voir les gens transformés à la fin des rencontres est ma plus grande joie. Entendre leur témoignage est un encouragement pour beaucoup de personnes ». Christine Koenig, de Campus pour Christ, se demande comment aider les personnes à faire également un chemin spirituel : « je vois la grâce de Dieu agissante. Ma grande joie est le travail en équipe ; mais l’animation des groupes constitue un grand défi : il faut être attentif pour que la parole circule bien ».

En effet, la vie du groupe est essentielle durant ces rencontres. S’il y a une partie consacrée à l’enseignement (sur des thèmes centraux comme la communication, le pardon, les relations avec les enfants, avec son entourage, comment rebondir, les questions morales et spirituelles, etc.), l’essentiel est dans le partage.

C’est ce qui a aussi plu à Pascal Dorsaz, le responsable de la Pastorale de la famille de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud : « Ce qui m’a touché est la première rencontre, où la réalité de la situation de séparation est prise en compte. C’est une clé fondamentale. Je recommande ce cours car il permet de se mettre en route. Le Seigneur est présent dans toute tentative de se relever ».

Témoignages

La journée s’est terminée par quelques témoignages. Comme dans les rencontres du parcours, ce sont les moments les plus émouvants.1

Christiane raconte comment ce cours l’a aidée à pardonner : « J’ai du travailler le pardon, car je n’arrivais plus à prier la demande du Notre Père : « pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ». Ce cours m’a permis de me battre contre la douleur et la honte. J’ai été heureuse de faire ce choix. Cela m’a fait du bien de voir que d’autres expérimentaient les mêmes sentiments ».

Nicoletta
 constate qu’en Suisse, le divorce parmi les chrétiens reste tabou, surtout dans les Eglises évangéliques : « J’avais tellement honte d’avoir vécu deux divorces. J’étais très seule. Ce cours m’a donné un sentiment d’appartenance. On y touche des choses très profondes. »

« Je voulais faire le pas de quitter la honte du divorce, affirme Philémon. Tout dans ce cours m’invitait à faire face à la réalité que je ne voulais pas voir. La session « gérer les autres relations » m’a ouvert les yeux : j’avais totalement négligé les amis et la famille tant j’étais fixé sur ma séparation ».

Pour Francesca ces rencontres ont été comme une renaissance : « Je suis partie de chez moi pour survivre, mais j’ai alors sombré. J’ai tout perdu, jusqu’à l’estime de moi. Je n’avais plus aucun espoir et étais complètement isolée dans ma douleur. Je voulais mourir. Après un séjour à l’hôpital, j’ai été invitée au cours Revivre. Après un témoignage je me suis senti comprise, je n’étais plus seule. Je pouvais mettre des mots sur ce que je ressentais. Cela m’a donné une force nouvelle, transformée même physiquement, j’ai repris confiance en moi et recommencé à chanter… J’étais très en colère contre Dieu pendant longtemps. En fait il ne m’avait jamais lâché. Avec lui tout est possible ».

« J’étais un peu déçu du Christ : dans la Bible il fait des miracles, mais pas dans ma vie », dit Claude. En relisant l’histoire de Joseph qui a été durant 13 ans en prison, cela m’a encouragé à persévérer. Je suis venu à Revivre suite à un témoignage donné durant la messe. Le cours sur le pardon a été très important ».

Pour Frédéric, la rencontre sur l’importance de mettre des limites a été déterminante. « J’ai alors mis des limites que ma femme, étonnée, a respectées. Ce cours répond à un besoin profond de l’Eglise et de la société. »

Solange a fait le cours une deuxième fois et a découvert une grande richesse : « rester en lien avec les participants du cours est important. Comme c’est moi qui ai quitté mon mari, le fait qu’il y ait plusieurs personnes qui ont fait la même expérience dans notre groupe m’a encouragée ».

Le parcours Revivre invite aussi à la réconciliation, lorsque c’est encore possible. Léonard et Alessia témoignent comment ils ont été aidés sur le chemin du pardon : « Pardonner n’est pas gagné d’avance. Demander pardon n’est pas une faiblesse, c’est une force. Quand on pardonne la vie revient. Mais quand on ne peut pas pardonner, on a comme une boule qui reste au ventre. Cela ne veut pas dire que tout ira bien, mais nous avons compris qu’il faut dialoguer ».

Et la suite ?

Des équipes se sont à nouveau constituées pour proposer au printemps 2013 des rencontres« Revivre » en Valais, sur la côte lémanique et dans le canton de Fribourg. Cette journée a permis de donner un nouvel élan à cette démarche qui a déjà été une source d’encouragement pour plus de 300 personnes en Suisse romande.

(Perspectives | Mars 2013)
www.campuspourchrist.ch

1 Les noms ont été changés.